MESSE DE RENTREE ACADEMIQUE 2010- 2011 A L’UCAO/UUA

Lundi 4 octobre 2010
Monsieur l’Abbé Jules DJODI, Président de l’UCAO/UUA
Messieurs les Vice-présidents de l’UCAO/UUA
Monsieur l’abbé Secrétaire Général de l’UCAO/UUA
Monsieur l’Abbé Pierre NIAVA BOGUI, Doyen de l’UCAO/UUA
Révérends Pères, chers formateurs,
Chers parents, amis et invités,
Chers amis étudiants,
L’an dernier, à l’occasion de la messe solennelle de rentrée académique 2009-2010, je priais pour que vous sachiez écrire individuellement ou collectivement, les choses les plus sublimes de l’histoire de notre unité universitaire, sur la page de la nouvelle année qui s’offrait à vous. J’avais ajouté également qu’avec le vent du renouveau, vous devez faire en sorte que notre Institution soit hissée au rang de la meilleure université de Côte d’Ivoire, pour ne pas dire d’Afrique.

Cela constituait pour vos Pères les évêques, un challenge qui nous attendait tous et qu’il nous fallait relever. J’avais terminé en disant que la tâche ne sera pas facile, mais qu’il ne faisait aucun doute qu’en ce mois de Marie, mois du Rosaire, Dieu nous aidera par la Vierge à impulser à notre unité universitaire, l’élan nécessaire qui conduira à faire d’elle, une œuvre qui plaise à ses yeux.
Les résultats que nous escomptions, nous vos Pères les évêques de l’espace CERAO, il faut se l’avouer, sont en deçà de nos attentes. Néanmoins, nous reconnaissons qu’en l’espace d’une année académique, beaucoup de choses ont été réalisées sans pour autant occulter qu’il nous reste encore du chemin à parcourir pour atteindre notre objectif commun : faire de notre Institution, un pôle de référence en matière d’éducation et de formation dans notre sous-région ouest- africaine en particulier, en Afrique et dans le monde en général.
Cette année académique 2010-2011 que Dieu nous offre, s’ouvre quant à elle dans un contexte particulier marqué par la célébration du cinquantenaire des indépendances de nombre de nos pays africains. En effet, il ya de cela cinquante années, de nombreux pays d’Afrique prenaient leur indépendance par rapport aux puissances coloniales.
Cela avait suscité de grandes espérances pour le développement politique, économique, social et culturel des peuples africains. Bien qu’en certains pays, la situation intérieure n’ait pas encore trouvé malheureusement sa stabilité et que la violence parfois ait triomphé ou triomphe encore, cela ne peut pas donner lieu à une sentence générale de condamnation qui inclut tout un peuple, toute une nation ou, pis encore, tout un continent.
Mais, reconnaissons que la situation qui est la nôtre aujourd’hui, et il faut avoir le courage de le dire, est dans bien des domaines, commune à la majorité de nos états africains. Le constat en est à la fois triste et amère : misère, dépravation des mœurs et du tissu social, absentéisme, banditisme, mauvaise administration de nos ressources disponibles, instabilité politique, coups d’état et autres rébellions, guerres, désespoir. Voici le tableau.
En définitive, l’Afrique ressemble à ce blessé de l’évangile que nous venons d’entendre, couchée sur le bord du chemin et qui attend un hypothétique Bon Samaritain. Dans la perspective de la célébration du centenaire de l’accession de nos pays à l’indépendance, allons-nous continuer à tendre la main, à attendre des bons Samaritains venus d’autres cieux ? N’est-il pas possible de trouver en notre sein, de jeunes africains capables de prendre la relève de leurs aînés, pour faire entendre la voix de l’Afrique, non pas celle d’une Afrique qui mendie, mais d’une Afrique qui parle d’égal à égal avec les autres continents de la terre ?
Chers amis étudiants, c’est ici que je voudrais vous faire un clin d’œil pour vous dire que l’Afrique de demain, c’est à vous qu’il appartient de la construire. Cela passe par des étudiants soucieux de leur devenir et qui ont une haute opinion d’eux-mêmes. A ce titre, je voudrais vous recommander, d’avoir des priorités dans votre vie.
1- De la nécessité pour vous d’avoir des priorités
Chers amis,
Vous le savez certainement. Dans la vie de tout homme, dans votre vie également, il ya des choix fondamentaux à faire à un moment ou à un autre de notre existence. Cependant, parmi ces choix fondamentaux, il ya des priorités. La grande question que j’ai envie de vous poser est celle de savoir, quelles seront les vôtres ? Avez-vous conscience que l’avenir vous appartient et que dans une dizaine, voire, une vingtaine d’années, c’est à vous qu’il reviendra de construire nos pays ? Savez-vous que certains de vos comportements et attitudes feront que n’aurez plus de crédit vis-à-vis de vos interlocuteurs, ceux d’ici de même que ceux d’ailleurs plus tard? Retenez que tout ne concourent pas nécessairement à votre épanouissement. Il vous appartient de voir les malaises de nos pays, de les analyser sereinement mais de découvrir surtout les opportunités qui s’offrent à vous. Dès lors, la question demeure : quelles sont vos priorités?
La première lecture de ce jour qui est extrait de la Lettre de Saint Paul aux Galates, nous présente l’Eglise galate, être l’enjeu d’un combat capital pour l’avenir de l’Eglise. Alors que lui Paul, délibérément tourné vers le monde grec à convertir, a prêché un évangile de liberté dégagé des pratiques juives, certains chrétiens judaïsant sont venus semer le trouble en prétendant que ces pratiques étaient la condition du salut.
Paul proteste avec passion car accepter cette façon de voir, c’est retourner en arrière, c’est se détruire spirituellement en revenant à une religion de pure pratique. Ce qui sauve, c’est la foi en Jésus-Christ venant renouveler l’homme en le pénétrant de son esprit de filiation.
Vous aussi, c’est aujourd’hui qu’il vous faut prendre conscience que votre avenir, l’avenir de nos état africains doit constituer pour vous un enjeu capital. Je vous exhorte, comme Saint Paul hier, à protester avec passion contre tous ces tares de nos sociétés. Sachez que l’Afrique de demain sera certainement à l’image de ce que vous aurez décidé qu’elle soit. Quelle est cette Afrique que vous voulez ? Une Afrique qui n’a pas de repères ? Une Afrique où la corruption est la valeur la mieux partagée ? Une Afrique à l’agonie parce que vous, vous n’aurez pas su prendre vos responsabilités à tant ?
Refuser de vous inscrire dans tout acte, toute action qui vous feront retourner en arrière et vous détruire. L’honneur qui vous est fait d’appartenir à cette Institution est une charge dont vous devez mesurer toute la portée. Appréciez à sa juste valeur les énormes sacrifices que vos parents consentent à vous scolariser dans ce genre d’établissement scolaire.
Ailleurs, dans notre pays, tout comme dans bien d’autres, certains jeunes envient votre situation. Ne gâchez pas la chance qui est la vôtre car à l’extérieur du continent, certains jeunes africains se forment et attendent de venir occuper les places que vous ne saurez leur disputer plus tard parce que vous n’aurez pas su saisir votre chance aujourd’hui. J’insiste pour vous redire que ce sont le travail et les études qui affinent notre intelligence et donnent le bonheur à ceux qui s’y adonnent.
Nos états africains de demain, n’ont que faire des étudiants paresseux, partisans du moindre effort, les yeux rivés vers le ciel, les mains toujours tendus, et qui attendent que tout leur tombe dessus comme par une opération quelconque du Saint Esprit. Oui, ce nous, vos Pères évêques attendons de vous, c’est qu’en définitive, vous soyez pour nos pays, les Bons Samaritains de l’évangile.
2- Soyez pour nos pays, les bons Samaritains
L’an dernier, j’avais mentionné à l’endroit de vos formateurs que la responsabilité qui est la leur, les engage à être pour vous étudiants, de Bons Samaritains, c’est-à-dire, des hommes qui conçoivent leur devoir de formateurs, comme un sacerdoce, un service rendu aux autres. Je leur avais même recommandé qu’à l’exemple du Bon Samaritain qui s’est armé de patience pour aider le blessé, de même, eux aussi, devaient s’armer de patience pour vous aider, vous leurs jeunes frères.
Cette année, c’est à vous que je fais cette recommandation : chers amis étudiants, c’est à vous de devenir des Bons Samaritains pour nos pays africains
Dans l’évangile de ce jour, le docteur de la Loi veut mettre Jésus dans l’embarras en lui posant une question : ‘‘mais qui est mon prochain ?’’ Jésus ne le dira pas parce qu’il veut que son interlocuteur fouille son cœur et trouve lui-même la réponse. C’est une manière toute nouvelle d’entrer dans la Parole de Dieu. Jésus emploi une parabole parce que ce discours est moins juridique, légaliste d’autant plus qu’il est question ici d’amour, donc d’une réalité chaleureuse, intérieure, cordiale.
Par définition, Dieu se situe sur notre chemin, où que nous soyons, quelle que soit notre condition ou notre état. Il est à notre égard, en condition d’amitié et, notamment, de miséricorde, dès lors que nous sommes en situation pitoyable. S’il est amour, il est, du même coup, le prochain absolu et parfait.
En vous exhortant à aller voter massivement pour le candidat de votre choix, je vous invite lors de la campagne, à savoir reconnaître dans les autres, non pas des ennemies, mais des adversaires, des frères qui ont le même objectif que moi, la Côte d’Ivoire, mais des frères, qui ont vision différente de la mienne.
Le Bon Samaritain, c’est celui-là qui bien qu’ayant une seule monture, s’en dessaisit pour l’autre, c’est en fin de compte, celui qui se dépouille, qui fait preuve de bonté, qui sort de lui-même pour aller vers l’autre, celui qui fait éclater les barrières religieuses, raciales, politiques. C’est à cette façon de faire que je suis venu vous inviter.
Agir comme le Bon Samaritain de l’évangile, c’est être véritablement mû par l’amour. En disant cela, je vous invite surtout à savoir lire les signes des temps et encore une fois à beaucoup de vigilance et à plus de maturité dans vos engagements politiques et idéologiques. J’insiste pour vous redire avec vos Pères les évêques de Côte d’Ivoire de refuser de vous laisser manipuler et instrumentaliser par les hommes politiques.
Chers amis,
La Côte d’Ivoire notre beau pays, retrouvera certainement la place qui est la sienne dans le concert des nations. Mais elle aura surtout besoin de cadres compétents, pour la hisser vers les sommets pour en faire une nation respectée et respectable. Cela passe par la formation des jeunes que vous êtes, des jeunes qui prennent au sérieux leur vie, en étant studieux et généreux dans les efforts. Sur ce chemin de la générosité dans les efforts à fournir, vos formateurs, vos parents seront toujours là pour vous donner les moyens de faire en sorte que demain, vous n’ayez pas à regretter le temps que vous pouvez perdre aujourd’hui, parce que n’ayant su qu’elles étaient vos priorités.
Bonne, heureuse et fructueuse année académique.

+ Jean Pierre KUTWÃ
Archevêque d’Abidjan
Vice Grand Chancelier de l’UCAO/UUA

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