Temps de l’avent Attente joyeuse du Messie
Par P. Kpandjé Florent Hippolyte AGNIGORI, Dr
I- Un difficile début…
Les célébrations des grandes fêtes ont toujours eu un temps de préparation collective ou individuelle pour mieux comprendre ou du moins mettre en valeur la solennité ou la festivité ainsi attendue. Le judaïsme et les multiples religions profanes dressaient aussi dans cet élan de programmation de festivité un temps de prise de conscience de l’événement qui approche. Justement, le Christianisme nait dans cette ambiance culturelle où tout semblait bouclé en croyance. Très tôt, on taxa le Christianisme de superstitio pour l’éradiquer et asseoir une stabilité politique déjà troublée par les rivalités au-delà des ‘’limes’’ (limites ou frontières) de l’empire romain. Dans cet élan d’extension de son hégémonie, Rome devait discipliner les religions en vigueur sur son vaste territoire difficilement délimité. C’est dans un tel cadre que nait le Christianisme qui, dans un surpassement assez osé imposa la Solennité de Pâques en brandissant avec fière allure le Mystère Pascal qui inscrivit la passion, la mort et la Résurrection de Jésus aux calendes de leur vécu. Après cette fête célébrée avec faste, dès le départ, les persécutions vinrent déceler les chrétiens véritables des chrétiens tremblants. C’est ainsi que les deux premiers siècles du christianisme ont pu mettre à la lumière de l’existence romaine l’évènement pascal. Personne ne pensait que ces chrétiens iraient loin dans leur perspicacité et leur sens de l’observation très pointu.
II- Les divinités romaines…
Le troisième siècle, avec le constat des célébrations des jours anniversaires de naissance des rois, des reines, des princes et même des divinités majeures, vint octroyer à la pensée chrétienne le désir de trouver une date qui commémorerait la naissance de Jésus. Cet état de fait, avec la célébration à Rome au IIIe siècle de la divinité profane Mithra (avec une nouvelle appellation romaine sol invictus) le 25 Décembre, divinité appelé messie solaire du grand dieu solaire perse Ahura Madza, fit mettre, dans un souci de christianisation le même jour, la commémoration de la naissance de Jésus. Les moments de fêtes ainsi annoncées occasionnaient de manière anticipée une période de réjouissances qui varient en appellation selon les rites.
En effet, on ne célèbre pas une divinité ou un anniversaire de roi sans préparation. Le peuple, à l’approche de ces fêtes, se préparait. Tout devait concourir à la beauté de la réalisation de ces fêtes profanes. Dans les préparatifs, personne n’avait droit à l’erreur, il fallait être prêt pour que les fêtes soient réussies. C’est l’exemple des saturnales romaines qui offraient un certain relâchement ou un certain renversement de l’échelle des valeurs.
Par ailleurs, L’exemple le plus frappant de vives préparations est celui des gladiateurs qui devraient combattre à mort dans les arènes. La préparation était ardue. Tout ce tableau ainsi dressé nous fait comprendre l’importance de la préparation d’une fête ou d’un anniversaire au IIIe siècle.
III-IVe siècle : ère providentielle
Au IVe siècle, avec la venue providentielle du roi Constantin qui aima le christianisme, on se rendit compte qu’une nouvelle ère d’espoir s’offrait au christianisme longtemps taxé de religion illicite. Après le concile de Nicée en 325, on admit la célébration de Noel dans le chronographe de 354 avec le pape Libère. Assez vite, le christianisme gravit les échelons dans l’empire romain et devint à la fin du quatrième siècle religion d’état. Les chrétiens commencèrent à solenniser leurs fêtes en leur accordant un temps de préparation (à la fin du quatrième siècle naquit le carême chrétien) ; il faut attendre la fin du VI et au début du VIIe pour voir poindre un temps de préparation à Noël qu’on appela ‘’temps de l’Avent’’. Ce terme tire son origine du mot latin ‘’Adventus’’ qui, en fait, appartient au vocabulaire militaire romain des trois premiers siècles.
IV-Adventus militaire, Avent chrétien…
A cette époque,’’Adventus’’ (l’arrivée) commémorait l’arrivée de l’Empereur dans Rome, que ce soit au début de son règne ou lors du retour d’un long voyage. Cette inscription « ADVENTUS » fait aussi référence à l’arrivée des Empereurs dans les Cités ou Provinces de l’Empire. Lors de leur accession au trône, les empereurs n’étaient pas transportés dans un char, mais se déplaçaient à cheval, et parfois même à pied. C’est ainsi qu’ils faisaient leur première entrée publique dans la Capitale de l’Empire Romain. Cette procession équestre de l’Empereur dans Rome, donna lieu à Rome à la naissance de plusieurs monnaies sur lesquelles était frappée en guise d’exemple, l’image d’un Empereur à cheval accompagnant la légende ADVENTVS AVGVSTI (« l’arrivée de l’Auguste »).
L’arrivée de ces dignitaires militaires était soigneusement et scrupuleusement préparée : on pouvait admirer des pétales de fleurs dans les villes qui les recevaient et des remises de couronnes romaines. Toutes ces attitudes ne laissaient pas les chrétiens indifférents. Devenu religion d’état, le christianisme, toujours dans un souci de christianisation, exploita ces différents rites en leur donnant une autre interprétation.
Le temps de l’Avent devint pour les chrétiens des VIe et VIIe siècles, un temps de préparation de la venue (dans le sens de la naissance), de l’arrivée du Messie-Jésus, du soleil invincible Jésus. (Avec le Pape Grégoire Premier). Il y eut plusieurs manières de le célébrer (avec le jeûne etc.), mais par la suite, on vint à admettre que le temps de l’Avent, différent du temps de carême se célébrerait dans l’espérance et une invitation à être vigilant. Il ne comporte pas de jeûne en occident. Dans les Églises utilisant le calendrier romain, l'Avent débute le quatrième dimanche avant Noël, et marque le début de l'année ecclésiastique ou liturgique. La couleur liturgique de cette période est en général le violet.
Ce temps1 célèbre l’attente de la venue du Christ parmi les hommes à la fois pour l'avènement de sa naissance et son avènement glorieux à la fin des temps. Il célèbre aussi de manière insidieuse notre préparation personnelle à la rencontre (à notre mort) du Maitre de la vie . Toute cette symbolique d’attente est bien ponctuée dans les quatre dimanches qui constituent ce temps d’espérance :
• Dimanche du Levavi : Ad Te Domine levavi animam meam (Ps 25)
• Dimanche du Populus Sion : Populus sion ,ecce Dominus veniet (Is. 30,19)
• Dimanche du Gaudete : Gaudete in Domino semper ( I Thes.5,16)
• Dimanche du Rorate : Rorate caeli desuper, « Répandez la rosée, ô cieux »
Dans le Calendrier liturgique catholique, le temps de l'Avent est constitué de quatre semaines, commençant chacune par un dimanche :
- Premier dimanche de l'Avent (Levavi),
- Deuxième dimanche de l'Avent (Populus Sion)
- Troisième dimanche de l'Avent (Gaudete)
- Quatrième dimanche de l'Avent (Rorate)