Dimanche 24 janvier 2021, Année B

3e Dimanche du Temps Ordinaire

Homélie

La conversion, une urgence des temps nouveaux

Mes bien-aimés frères et sœurs dans le Christ, le 3e dimanche du temps ordinaire de l’année liturgique B, dimanche de la Parole de Dieu selon le vœu du pape François, est une exhortation à la conversion. C’est ce qui ressort substantiellement des textes proposés : Jonas 3,1-5.10 ; 1 Corinthiens 7, 29-31 ; Marc 1, 14-20. Deux axes vont conduire la présente méditation : La conversion, un appel de Dieu et la conversion comme défi quotidien et permanent pour l’Homme.

 

  1. 1.      Dieu nous appelle à la conversion

De manière générale, se convertir, c’est changer. On parle souvent dans le langage ordinaire de conversion voire de reconversion dans le cadre professionnel, sportif, politique, religieux etc. Dans la vie spirituelle, se convertir, c’est passer du péché à la grâce, du mal au bien. La conversion est donc la capacité de revenir à Dieu après s’être éloigné de lui à cause du péché.

Aussi, dans la Révélation biblique, l’on pourrait noter plusieurs références scripturaires où l’on montre l’appel à la conversion lancé par Dieu aux Hommes (Isaïe 44, 21 ; Jérémie 3, 12-14 ; Ézéchiel 18, 30-32 ; Osée 14, 2-9 ; Luc 5,32, etc). Ces appels dénotent le caractère vital de la conversion dans la relation avec Dieu eu égard à l’enjeu : notre éternité. Voilà pourquoi dans l’évangile de ce dimanche, dès le début de son ministère, Jésus va nous inciter à la conversion en Marc 1, 14-20 : « Les temps sont accomplis : le règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à l’Évangile. » Pourquoi se convertir et croire à l’Évangile ? 

L’Évangile est la Bonne Nouvelle que Jésus est venu nous annoncer de la part de Dieu. Cette Bonne Nouvelle consiste à dire qu’en sa Personne, l’Homme est capable déjà ici-bas, d’entrer dans la vision de Dieu, la vision béatifique. Il le dira lui-même en d’autres circonstances : « Qui m’a vu a vu le Père » (Jean 14,9). En outre, en sa personne, nous sommes dans l’accomplissement des temps derniers où se réalisera pleinement le Royaume des Cieux. Cet accomplissement, les sages et les prophètes ont voulu le voir mais ne l’ont pas vu. Or en Jésus Christ, le Royaume est déjà présent : « Père, Seigneur du ciel et de la terre, je proclame ta louange. Ce que tu as caché aux sages et aux savants, tu l’as révélé aux tout-petits » (Luc 10, 21-24). Ou encore « Heureux êtes-vous car ce que les prophètes et les sages ont voulu voir, vos yeux l’ont vu » (Luc 10, 24). Ainsi en Jésus Christ, nous sommes les contemporains de Dieu et de son œuvre de Salut qui chaque fois s’actualise pour nous dans l’Eucharistie. L’eucharistie est donc le sacrement de l’accomplissement du Royaume puisqu’en elle nous célébrons les noces éternelles de l’Agneau de Dieu. Elle est à la fois une anticipation et une réalisation dans notre vécu de l’éternité avec Dieu. On le sait, chaque jour nous rapproche lentement mais sûrement de l’éternité. On ne peut pas nier cette réalité. Chaque moment de la vie est un pas de plus vers les fins dernières où nous aurons à rendre compte à Dieu de ce que nous avons fait. Il est donc impérieux que nous en prenions conscience mais de plus que nous empruntions le chemin absolument nécessaire pour être admis dans la félicité divine. Ce chemin est celui de la conversion. Un chemin difficile car exigeant. Il exige de nous que nous sortions de toutes ces réalités peccamineuses ou situations de péché qui sont devenues pour nous des conforts mais qui nous éloignent de Dieu et de la Vérité de sa Parole. Écoutons le Christ nous y inviter par cet avertissement : « Entrez par la porte étroite. Large est la porte et spacieux est le chemin qui mène à la perdition, et nombreux ceux qui s’y engagent ; combien étroite est la porte et resserré le chemin qui mène à la vie, et peu nombreux ceux qui le trouvent » (Matthieu 7, 13-14). On constate ainsi que le changement de vie devient quelque chose de quotidien.

  1. 2.      La conversion, un défi quotidien et permanent

 

Lorsque l’on me pose la question relative à mon intention personnelle de prière, je demande qu’on prie pour ma conversion. Cela fait sourire certains et étonnent d’autres qu’un prêtre souhaiterait que l’on prie pour sa conversion. Ou bien, quand avec humour, je dis aux uns et aux autres que je prierai pour leur conversion, ils se mettent à rire et me rétorquent : « Mais mon père, nous sommes déjà convertis. »

Mes frères et sœurs très chers, sur la terre, personne ne peut dire avec certitude qu’il est converti totalement et profondément car chaque jour est pour nous un défi. Il est un défi dans la mesure où durant notre parcours terrestre, nous sommes en tension entre Dieu et le diable, entre la Grâce et le péché, entre le Bien et le mal. Chaque instant de notre existence nous avons donc des choix à faire. Parfois, nous choisissons le chemin de Dieu, parfois nous marchons contre Lui. On remarque ainsi que la conversion n’est pas une réalité statique. Loin d’être quelque chose de figé, la conversion est dynamique. Elle demeure un mouvement vers Dieu, vers la Grâce, vers le Bien.  Elle nous met donc en marche vers la sainteté pour correspondre à cette injonction du Christ : « Vous donc, soyez parfaits comme votre Père céleste est parfait » (Matthieu 5,48). La perfection voulue par Dieu est un combat de chaque instant qui requiert de notre part une attention et une vigilance quotidiennes par la méditation de la Parole de Dieu et la prière, soutenues en cela par la pratique du sacrement de la confession. En effet, chaque jour, la Parole de Dieu nous réveille et nous interpelle comme le stipule la 1e lecture en Jonas 3,1-5.10. Dans ce passage, Dieu mandate Jonas auprès des habitants de Ninive pour leur révéler tout le mal commis par eux et le châtiment qui leur est réservé. En entendant cela, les Ninivites décident de changer de comportement pour plaire à Dieu. Leur volonté de conversion touche le cœur de Dieu qui accepte de leur faire miséricorde. Même si changer de manière d’être et de vivre est dure et difficile, il faudrait le faire. Pour cela, nous aurons besoin de l’assistance du Saint-Esprit, lui qui nous aide à comprendre la Parole de Dieu et à la mettre en pratique.

Enfin, dans l’extrait de l’évangile de ce 3e dimanche du temps ordinaire de l’année B, le Seigneur, en appelant les premiers disciples, leur annonce qu’il ferait d’eux des « pêcheurs d’hommes ». Par le baptême, le Seigneur nous a choisis et il nous a associés à son ministère du Salut, faisant de nous ses collaborateurs. À nous aussi, il donne mandat pour que nous devenions des pêcheurs d’hommes. Cela devra se traduire par la parole mais aussi et surtout par le comportement. En effet, si nous voulons appeler les uns et les autres au changement notable, il faudrait que nous devenions nous-mêmes véritablement des personnes converties, des personnes qui vivent réellement ce qu’elles annoncent. Sinon, nous ne serions que de purs hypocrites. Nous sommes ainsi invités à être des artisans de conversion. Le monde d’aujourd’hui n’écoute plus les maîtres, c’est-à-dire ceux qui parlent pour parler. Il y a trop de paroles. Le monde contemporain suit les témoins, c’est-à-dire ceux qui mettent en pratique ce qu’ils disent. Et si le monde actuel écoute les maîtres, c’est parce qu’ils sont d’abord des témoins, selon Paul VI dans son exhortation apostolique Evangelii Nuntiandi (8 décembre 1975). Devenons donc des témoins de l’appel à la conversion. Ce dimanche, nous célébrons le 125e anniversaire de l’annonce de l’Évangile en Côte d’Ivoire. Hier des missionnaires, venant de leurs pays, bravant toutes les difficultés qui se sont présentées à eux (barrières linguistiques, climat tropical avec son lot de maladies, hostilité de certains peuples, etc…), nous ont apporté la Bonne Nouvelle. Certains sont morts peu de temps après leur arrivée, d’autres sont rentrés chez eux par manque d’adaptation, d’autres ont persévéré et sont restés chez nous, devenant des nôtres. Grâce à eux, la Parole de Dieu a pris chair en Côte d’Ivoire. 125 ans, que de chemins parcourus. C’est l’heure du bilan. Qu’avons-nous fait de l’héritage précieux que nous ont légué tous ces missionnaires ? Désormais, devenus adultes dans la foi, la Parole de Dieu de ce dimanche nous exhorte à devenir nous-mêmes nos propres missionnaires. En effet, chaque baptisé est issu de la moisson des premiers missionnaires, nos devanciers, nos pères dans la foi. Nous sommes les héritiers du sang, de la sueur, du courage et de la mort de ces hérauts et héros de la foi chrétienne dans notre si beau pays, « la 2e Patrie du Christ » selon les mots du Cardinal Paul POUPARD lors de la célébration du Centenaire de l’Église de Côte d’Ivoire en 1995. Soyons les dignes héritiers de ces hommes et femmes venus d’ailleurs mais qui sont devenus nôtres. Ivoiriens, devenons nous-mêmes nos propres missionnaires.

Bon dimanche de la Parole de Dieu à tous et toutes dans la célébration de la clôture des festivités marquant le 125e anniversaire de l’évangélisation de la Côte d’Ivoire. Dieu nous bénisse tous et toutes.

 

Père Sylvain du Saint Nom de Jésus, Vicaire Paroisse Sainte Famille Riviera 2

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