L’ouverture des festivités marquant le 50eme anniversaire de l’accession à l’indépendance de notre pays la CI

Chers frères et sœurs,

Nous voici encore une fois réunis dans cette maison de Dieu pour célébrer dans la prière, l’ouverture des festivités marquant le 50eme anniversaire de l’accession à l’indépendance de notre pays la CI
Notre célébration de ce jour est une action de grâce pour les 50 ans d’indépendance, une invitation à prier constamment pour la réconciliation la justice et la paix, facteurs déterminant pour sortir notre pays du sous développement.

Le constat que nous faisons pour notre pays la CI ; c’est que après 50 ans, le pays reste encore à la traine dans le concert des nations

En effet, dans l’euphorie des fêtes de l’indépendance, l’espoir est né en chacun d’avoir une place au soleil, une belle et digne comme il était permis d’en rêver au départ. Mais au fil du temps, des appétits désordonnés se sont fait jour.
Dangereusement s’est installé un clivage entre d’une part les riches et les très riches, d’autre part entre les pauvres et les très pauvres.
Cette manière de vivre a eu pour conséquence : taux élevé du chômage, hommes et femmes seuls, étudiants sans espérance, paysans inquiets, jeunes et adultes désabusés qui ne voient pas le bout du tunel
Ces pauvres traditionnels ou moderne, développent des sentiments d’espérance déçue, de frustration constante et s’installent finalement dans le découragement, la fatalité, et une revolte parfois légitime.
Or nous savons que tout état qui se respecte a besoin pour se développer d’entente parfaite entre les populations de justice et de paix. Notre pays ne saurait déroger à cette règle fondamentale.
Aujourd’hui où nous ouvrons les festivités du 50eme anniversaire de l’accession de notre pays à l’indépendance donnons sens à ces trois valeurs que sont la réconciliation la justice et la paix.

Réconciliation moteur de cohésion sociale et de développement

Seul Dieu peut nous donner la capacité de pardonner et de nous réconcilier. Seul lui peut nous montrer le chemin du vrai pardon qui grandit, pacifie, fait prendre de la hauteur pour dépasser les marécages, la petitesse les contingences humaines. La reconciliation après ces blessures, ces pertes en vie humaines, les frustrations engendrés par nos égoïsmes, injustices est donc possible si nous laissons Dieu agir en nous, si nous montrons un peu d’humilité et de tolérance dans nos appréciations.
En effet après les malheureux événements qu’a connus notre pays certains compatriotes aussi bien du nord du sud, du centre que de l’ouest ont jurés de ne plus jamais pardonner à leurs agresseurs. C’est difficile nous le savons de pardonner à celui qui a détruit toute ta vie, ton existence. Je dirai même que c’est impossible, mais ce qui est impossible à l’homme n’est-il pas possible à Dieu ? Il suffit de s’ouvrir de laisser nos cœurs féconder par sa grâce car pardonner, c'est avoir part au don Dieu.
Aujourd’hui vos pères archevêques et évêques de Côte d’Ivoire, vous invitent à offrir ensemble à Dieu et à la vierge Marie toute la Côte d’Ivoire et ses habitants.
Pour réussir ce geste collectif de piété et d’espérance, il convient de nettoyer nos cœurs encombrés par la haine

« Lorsque tu vas présenter ton offrande sur l’autel dit Jésus, si là tu te souviens que ton frère a quelque chose contre toi, laisse là ton offrande devant l’autel, va d’abord te réconcilier avec ton frère, et ensuite viens présenter ton offrande. »(Mt5, 23-24)
Il n’ya pas de justice sans pardon ni d’amour sans référence à des valeurs spirituelle sûre. Faisons aujourd’hui la toilette de notre cœur purifions notre mémoire blessée et souillée, apprenons par étape à aimer sans frontière tout homme et tout l’homme.
Que le Dieu de miséricorde qui conduit l’histoire des peuples soit présent à notre cheminement national, qu’il nous inspire les paroles et les gestes qui rapprochent et réconcilient

Qui veut la paix cultive la justice

Si vous croyez en Dieu il vous renverra au respect scrupuleux de la dignité humaine. Il vous fera comprendre que tout homme en face est votre égale en valeur intrinsèque. Il nous faut une conversion totale pour admettre concrètement que la vie d’un ouvrier vaut celle du patron, que la vie du petit vaut celle du grand et que le mérite ne tient pas à la couleur de la peau, à l’ethnie ou à l’appartenance à un parti politique.
La justice édifiera la paix si chacun respect pleinement ses devoirs envers les autres.
Quels sont par exemple, nos critères de choix dans la préférence que nous donnons à telle ou telle personne à promouvoir ?
Est-ce la compétence, l’honnêteté, est-ce l’engagement politique ou, hélas, sommes nous plutôt tentés d’obéir à des critères religieux, aux volontés de la famille, de l’ethnie ou du parti politique. ?
Nous oublions que ces sortes de choix intéressés ne servent guerre le bien commun et que ces actes d’injustice camouflée installent à la tête des institutions des hommes et des femmes incompétents qui ne permettrons jamais à nos pays d’émerger.
Chers frères et sœurs, il n’ya pas de paix sans justice il n’ya pas de pardon sans réconciliation. Voila l’interpellation que je lance à ceux qui ont entre les mains le sort des communautés humaines, afin qu’ils se laissent toujours guider dans les choix graves et difficiles qu’ils doivent faire, par la lumière véritable de l’homme, dans la perspective du bien commun.

PEUT-ON PARLER DE PAIX CHEZ NOUS ?

Aujourd’hui, plus particulièrement, au plus profond de notre cœur, Dieu nous décrit la paix et retrace pour notre pays les chemins pour y parvenir.
Nos pères du concile Vatican II, nous convient sur le sujet à une saine réflexion, ils écrivent ceci :
« La paix n’est pas simplement une absence de guerre, elle ne se réduit pas à l’établissement d’un équilibre entre forces adverses, elle ne provient pas d’une domination despotique, mais il est tout à fait exact et approprié de l’appeler l’œuvre de la justice. Elle est le fruit d’un ordre inscrit dans la société humaine par son divin Fondateur, ordre à réaliser par les hommes qui aspirent à une justice plus parfaite. Il est vrai que le bien commun de l’humanité est dirigé, dans son plan fondamental, par la loi éternelle ; mais dans ces exigences concrètes, ce bien commun avec la marche du temps, est soumis à des perpétuels changements. La paix n’est donc jamais acquise une fois pour toutes : elle est sans cesse à construire.
En outre, comme la volonté humaine est faillible et qu’elle est blessée par le péché, la réalisation de la paix exige que chacun sache toujours dominer ses passions et que l’autorité légitime demeure vigilante.
Mais cela ne suffit pas. Pour que la paix sur cette terre soit obtenue, il faut que le bien des personnes soit en sûreté ; il faut que les hommes se communiquent spontanément, dans la souffrance, les richesses de leur esprit et de leur génie créateur. La ferme volonté de respecter les autres hommes et les autres peuples ainsi que leur dignité, la recherche effective de la fraternité sont absolument nécessaire pour la construction de la paix. C’est ainsi que la paix est encore le fruit de l’amour qui va bien plus loin que les avantages procurés par la justice.
C’est pourquoi tous les chrétiens sont appelés de façon pressante à vivre dans la vérité de l’amour pour s’unir aux hommes vraiment pacifiques afin d’implorer et de construire la paix. Poussés par le même esprit, nous sommes tenus de louer ceux qui renoncent à l’action violente pour revendiquer leurs droits et qui recourent à des moyens de défense accessibles même aux failles, pourvu que cela puisse se faire sans léser les droits et les obligations des autres ou de la communauté. »

Chers frères et sœurs, la paix, don de Dieu et œuvre des hommes n’est jamais acquise une fois pour toutes ; ici en Côte D’ivoire on peut affirmer qu’elle reste fragilisée et menacée par la radicalisation des clivages politiques et le régionalisme étroit.
Aujourd’hui plus que jamais, Dieu nous invite à la sagesse, tous autant que nous sommes.
Il est bon de nous débarrasser des bas sentiments d’orgueil, d’intolérance, de désir de vengeance et de réciprocité dans le mal, pour nous réconcilier afin de conduire notre pays vers la paix. Oui aujourd’hui plus que jamais Dieu nous le commande et la Côte d’Ivoire détentrice de tant de richesses humaines et matérielles l’attend pour une nouvelle page de son histoire, qui l’amènera à sortir du sous développement, au nom de Jésus à qui reviennent la gloire et la puissance, aujourd’hui et pour les siècles et des siècles

+ Mgr Jean Pierre KUTWA
Archevêque d’Abidjan

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