HOMELIE DE MONSEIGNEUR JEAN PIERRE KUTWÃ ARCHEVEQUE D’ABIDJAN A L’OCCASION DE L’ASSOMPTION DE LA VIERGE MARIE

Sanctuaire Marial Notre Dame d’Afrique Lundi 15 août 2011

Homélie du 15 Août 2010 Sanctuaire Marial.

‘‘Mon âme exalte le Seigneur, mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur. Il s’est penché sur son humble servante ; désormais tous les âges me diront bienheureuse. Le Puissant fit pour moi des merveilles ; Saint est son nom’’.

Révérends Pères,

Révérendes sœurs,

Frères et sœurs en Christ,

Ces quelques versets que je viens de citer en introduction, vous les connaissez certainement par cœur, habitués que vous êtes, à les réciter chaque jour à travers le ‘‘Magnificat’’, pour vous rendre proche de Dieu, par l’intercession de la Vierge Marie. Mais ces quelques versets confirment également, la fabuleuse prophétie d’une jeune fille anonyme de Nazareth, Marie, car plus de deux milles ans après, nous nous retrouvons, et nous continuerons de nous retrouver, pour rendre grâce à Dieu, d’avoir accepté de prendre chair de notre chair, de se faire l’un de nous !

Oui, en célébrant aujourd’hui l’Assomption de Marie au ciel, nous ne célébrons pas uniquement, celle que Dieu a élevée en son âme et en son corps à la gloire céleste, mais nous célébrons surtout, cette petite fille de Judée qui est entrée dans l’éternité, alors même que ses funérailles sont passées, à l’époque, totalement inaperçues. Nous célébrons celle dont la mort fut à l’image de ce qu’elle avait été durant sa vie : humble et discrète. Nous célébrons en réalité, un modèle pour notre monde aujourd’hui.

‘‘Mon âme exalte le Seigneur, mon esprit exulte en Dieu mon Sauveur’’. Ces paroles de la Vierge, pourraient laisser à penser que Marie a été uniquement une heureuse et chanceuse privilégiée, que le Seigneur avait prit soin de préparer, par anticipation, et que la grâce exceptionnelle qui lui a été offerte, lui enlève tout mérite propre et qu’elle aurait vécue, dans un cocon douillet, toute sa vie durant, sans qu’elle ne connaisse la moindre souffrance, la moindre incompréhension, la moindre contrariété. Et c’est ici justement que Marie se révèle pour nous un modèle de foi.

Parce qu’elle a su répondre positivement à sa vocation qui devait la conduire jusqu’à accepter l’incompréhension des habitants de Nazareth devant la naissance virginale, parce qu’elle a surtout accepté sa vocation de mère, c’est-à-dire de donner, un jour, son fils au monde, elle nous invite tous malgré les vicissitudes de la vie, à une nouvelle profession de foi, car nous sommes tous concernés par son assomption.

En effet, par son Assomption, l’Eglise nous rappelle clairement quelle est notre destination finale : nous sommes faits pour la gloire ! Comme Marie, nous devons tendre à notre propre assomption, destinés que nous sommes à la transfiguration éternelle. Pour nous donc, le meilleur n’est pas encore advenu. Les merveilles accomplies en Marie s’accompliront en nous, dans la mesure où, à son image, nous serons capables d’assumer notre destinée, là où l’appel du Christ a placé chacun de nous.

Dès lors, Marie devient pour chacun de nous, le prototype, la première des sauvés, comme le Christ est le prototype des ressuscités. Désormais, nous connaissons le but de la Création toute entière : l’histoire, notre histoire personnelle, l’histoire de notre pays, doit s’achever en fin heureuse. Cela nous invite à découvrir les vraies grandeurs de notre vie, comme Marie hier, en acceptant que sa vie soit toute donnée à Dieu. Le grand signe qui apparaît alors dans le ciel, nous dit la gloire de Dieu manifestée en sa servante, elle qui a su reconnaître en Lui, l’unique grandeur de sa vie.

Chant : ‘‘Un grand signe, apparu dans le firmament, une femme vêtue, de l’éclat du soleil, elle marchait sur la lune, couronnée de douze étoiles’’.

Frères et sœurs,

Si la découverte des vraies grandeurs s’imposent à nous, c’est justement parce que notre monde a perdu et continu de perdre ses valeurs. En effet, notre monde aujourd’hui est rempli d’hommes et de femmes troublés, qui ne savent pas tourner leur regard vers Dieu, pour reconnaître en Lui l’auteur de toute chose. Ils sont nombreux ceux qui sont découragés des épreuves, des difficultés rencontrées sur leur chemin et qui ne savent plus où donner de la tête. D’autres s’agenouillent devant ceux qui possèdent l’argent, le pouvoir, la gloire. Combien sont-ils, ceux de nos frères et sœurs qui sont capables des pires folies pour tel homme politique, tel artiste, telle femme, tel homme et qui découvrent un jour, la face hideuse de ces idoles qu’ils se sont eux-mêmes fabriqués et donnés ?

Marie nous invite par son Assomption à croire que seul Dieu, le Puissant, est capable de faire pour nous et pour notre pays des merveilles même si nous avons l’impression que notre horizon est sombre. Elle nous supplie de croire que Dieu est fidèle, qu’Il se souvient toujours de son amour, de la promesse qu’il a faite en faveur des hommes pour toujours, car cette promesse est valable pour nous aussi, habitants de ce beau pays. Enfin, elle nous pousse à louer Dieu avec elle.

Retrouvons donc les vraies grandeurs de simplicité, de discrétion et d’humilité auxquelles Marie nous convie. Elle a assumé, jour après jour, les humbles tâches de la vie quotidienne. Elle nous enseigne que la simplicité n’est pas médiatique. Marie ne s’est pas arrêtée à la routine, parce qu’elle savait que chaque geste qu’elle posait avait valeur d’éternité. Elle a essayé, toute sa vie durant, de faire la volonté de Dieu.

Marie par son Assomption, nous demande de croire que le plus merveilleux, c’est que notre corps humain aura sa part de gloire, comme ceux du Christ et son propre corps à elle ; que notre corps est une partie de nous-mêmes, mieux, que c’est nous. Ce corps nous a façonnés autant que notre esprit, au point que nous ne pouvons pas dire que nous ne sommes pas notre corps. En effet, sans notre corps, nous sommes comme amputés. Notre corps sera donc aussi glorifié et l’Assomption de Marie en est le signe prophétique, un signe qui veut nous redonner courage.

Dans la première lecture de ce jour, à travers un langage apocalyptique, Saint Jean veut redonner courage aux chrétiens persécutés. Il montre comment le dessein de Dieu s’accomplit dans l’histoire malgré l’ennemi.

La lutte finale est engagée. La femme, symbole du peuple de Dieu, engendre le Messie enlevé définitivement près de Dieu. Contre ce Messie, le dragon, symbole des forces du mal, ne peut plus rien. Il doit se replier sur la terre pour poursuivre l’Eglise et ses enfants dans le désert.

Oui, l’Assomption de Marie vient nous redire de ne perdre courage, car le dessein de Dieu s’accomplit toujours pour ceux qui croient et espèrent en Lui et si la lutte est engagée, jamais les forces du mal ne pourront l’emporter sur le Messie et sur son Eglise. Nous sommes donc invités, tout comme Marie, à avoir toute confiance en Dieu, dont la grâce nous précède toujours là où il nous envoie.

Frères et sœurs,

Voici l’espérance que je suis venu vous partager en cette fête de l’Assomption de Marie au ciel : l’Eglise, en annonçant cette Assomption, nous invite à réaffirmer notre foi en la toute-puissance de Dieu et à raviver la conscience de notre propre destinée. Notre corps, comme le sien, n’est-il pas déjà temple de Dieu ?

Dieu éternel et tout-puissant, Toi qui as fait monter jusqu’à la gloire du ciel, avec son âme et son corps, Marie, la Vierge immaculée, mère de Fils, fais que nous demeurions attentifs aux choses d’en haut pour obtenir de partager sa gloire. Donne à notre pays, à nos familles, à nos communautés, par l’intercession bienveillante de la mère de ton Fils et notre mère, de connaître l’entente et l’unité parfaite par Jésus, le Fils unique de la Vierge, qui est vivant, aujourd’hui et toujours, dans les siècles sans fin ! AMEN

+ Jean Pierre KUTWÃ

Archevêque d’Abidjan

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